« Les prédispositions professionnelles ne reposent pas forcément sur des compétences exprimées lors d’expériences précédentes, mais davantage sur des aptitudes. Ainsi, un candidat qui a dirigé une centaine de salariés dans un service d’assurances ou dans un atelier de production industrielle où règnent un certain sens de la hiérarchie et parfois des syndicats, ne saura pas automatiquement « manager » trois vendeurs dans sa boutique au quotidien. Il ne faut pas considérer le management uniquement sous l’angle descendant, c’est-à-dire à travers des ordres ou des directives à appliquer, mais également sous un angle ascendant : valoriser le regard et les initiatives de son équipe. Le chef d’entreprise franchisé doit faire preuve d’exemplarité », explique Laurent Poisson, consultant en franchise.
Un commerçant ne peut pas « s’enfermer » dans son bureau et diriger sa boutique à partir de données entrées sur des tableaux.
« Le commerce et le management ne se délèguent pas. On n’incitera pas son équipe à vendre si l’on ne vibre pas pour le commerce, si l’on part au fond du magasin dès qu’un client entre. On ne garde pas son équipe si on ne parle pas le même langage qu’elle. La technique liée au métier ou la gestion, au contraire, peuvent souvent se déléguer. Dans un restaurant, vous pouvez recruter un chef de cuisine, mais si vous ne savez pas sourire à chaque client…», reprend Laurent Poisson.
On peut penser que certains concepts nécessitent une moindre compétence en management en raison d’une équipe réduite en point de vente, mais il est parfois plus difficile de manager deux personnes que dix...
Avant même de déterminer ses compétences, d’autres aptitudes sont indispensables au métier d’entrepreneur : l’autonomie pour savoir décider sans s’isoler, une forte capacité de travail (65 heures hebdomadaires en moyenne), l’écoute auprès des clients et du franchiseur pour conserver une longueur d’avance sur la concurrence, et savoir s’entourer pour compenser ses imperfections.
« Il ne faut pas hésiter à faire un travail sur soi pour découvrir ou confirmer l’activité professionnelle qui convient le mieux à son potentiel. Certains cadres en reconversion se voient notamment offrir cette possibilité à travers un bilan de compétences, payé par l’entreprise qui les a licenciés », relève Pascale Pécot, consultante au sein d’Adventi Franchise.
Dans le choix définitif de l’activité à exercer quotidiennement, il faudra faire attention à certains métiers séduisants sur le papier.
« Les services à la personne, c’est surtout de la gestion de ressources humaines, et moins de l’accompagnement social. Une boutique de fleurs impose d’avoir les mains dans l’eau et le nez dans le froid toute la journée. Le filtre d’un franchiseur sérieux permet également d’aiguiller un candidat à la franchise sur ses aspirations », poursuit Pascale Pécot.
Certains profils professionnels sont plus particulièrement recherchés que d’autres par les enseignes de franchise.
« Parmi les excellents profils, on compte les chefs de rayon dans la grande distribution et des chaînes spécialisés, qui ont été en contact avec les clients finaux et ont eu une expérience de management, avant d’exercer des responsabilités comme directeur régional. Même si ceux-ci poursuivent en général leur carrière comme salarié… Un autre tremplin pour l’entrepreneuriat en franchise, c’est avoir été directeur d’un centre de ventes pour un opérateur téléphonique ou un constructeur automobile, avec la gestion de 5 à 10 salariés et une implication dans les comptes d’exploitation de l’agence », démontre Laurent Delafontaine, cofondateur du cabinet de conseil Axe Réseaux.
Les cadres en reconversion figurent également dans les cibles privilégiées des franchiseurs.
« Si les cadres en reconversion possèdent généralement un apport personnel conséquent, ils doivent avoir définitivement tourné la page du salariat, ne pas nourrir de rancune envers leur ancienne société et choisir une enseigne qui pourra leur proposer un niveau de revenus en rapport avec leurs prétentions. Ils pratiqueront un métier de proximité, ce qui exige humilité et rigueur, et d’être besogneux. Or, dans un premier temps, ils ont beaucoup de certitudes et s’imaginent très rapidement en manageur d’affaires avec plusieurs points de vente. Ils sont dans l’analyse conceptuelle, et non dans l’application logique. Et au début, en franchise, réfléchir, c’est désobéir et prendre des risques inutiles pour son affaire ! Enfin, il faut qu’en général, les jeunes franchisés recherchent sécurité et assistance dans des secteurs comme l’immobilier, la restauration et l’hôtellerie, où des normes évolutives sont à respecter », reprend Laurent Delafontaine.
Rappelons tout de même que la franchise a une formidable capacité à intégrer les compétences issues de tous horizons : jeunes, seniors, commerçants déjà installés, salariés, chômeurs…
François SIMONESCHI
Rédacteur en chef La Référence Franchise
Auteur du « Guide complet de la franchise 2012 » (éditions L’Express)
Isabelle Baraille, responsable ressources humaines de Norauto Franchise
« Renoncer à des choses qui fonctionnaient et en accepter d’autres »